de l’autre côté du miroir…

Depuis plus de deux semaines, je suis sur un voilier, dans les atolls du Pacifique.. Me connaissant c’est quelque chose d’assez fou. Parce que je ne connaissais rien, ou quasiment, au milieu de la mer, et que j’ai le mal de mer…Quand j’ai eu cette opportunité, soit je restais sur mes peurs, mes craintes, et dans ma zone de confort, soit j’allais tenter cette expérience malgré l’inconfort qu’elle allait représenter. Ne connaissant pas cet univers-là, je n’avais pas particulièrement d’attentes. A part, être le moins malade possible. Un avion et quelques heures plus tard, je passais de l’autre côté du miroir.

Avant de partir, quand j’annonçais mon voyage de 2 mois et demi en polynésie, toutes les réactions étaient plutôt “waow, quelle chance !”. S’octroyer un tel break paraît être un certain luxe, effectivement. Maintenant que je suis passée de l’autre côté du miroir, c’est plutôt l’inverse, ça paraît court pour les gens qui m’entourent ! Comme quoi tout est une question de point de vue..

Mon compagnon n’ayant pas pu rejoindre Tahiti à temps, je décidais de ne pas attendre, et de prendre un vol pour les Tuamotu, et plus précisément l’île de Kauhei, un petit atoll au milieu du Pacifique. L’avion à hélice, le survol de ces atolls aux eaux bleu turquoise, me fait déjà sentir un voyage unique.

Arrivée sur cet atoll, en plein milieu du pacifique, et atterrir là-bas, est une expérience unique. Je ne savais pas que cet atterissage me ferait basculer dans un autre monde. Entrer dans ce milieu de la voile, de “grands” voyageurs, était pour moi, passer de l’autre côté du miroir. Oui comme Alice aux pays des merveilles, Aurélie au pays des merveilles. Je n’arrête pas de m’extasier de la couleur de l’eau. Bleu outre-mer, turquoise, aussi transparente qu’une eau de rivière…

Mais cette expérience est bien plus que de belles plages et un bel océan. C’est un monde à part. Ces voileux qui, pour la majorité ont traversé le pacifique, voire plus, vivent cette vie depuis des mois ou des années. Ces personnes pour qui 2 mois et demi, c’est court.

Depuis des mois, ils passent dans des endroits plus beaux les uns que les autres mais sont toujours dans une admiration permanente, savourent la vie pleinement, de l’autre côté du miroir. Comme si, être en France, en Europe ou aux Etas-Unis, à travailler 5 jours par semaine, était une vaste blague à laquelle on ne les reprendrait plus. Certains travaillent à distance, d’autres font de petites pauses à terre pour travailler. Ils dépensent moins de 1000 € par mois pour vivre, et vivent dans les plus beaux endroits du monde. Forcément, ça fait réfléchir. On y retouve l’entraide d’une communauté qui évolue mais ne perd pas ses fondamentaux.

Je découvre donc la vie sur le bateau. Ce que je craignais surtout c’était le mal de mer, mais passé la première journée et la première nuit, je me suis acclimatée au mouillage. La première traversée, en revanche, s’est moyennement bien passée. Après plus de 6h, j’ai fini par être malade. Dans ces moments-là, on se dit que ça ne sera juste pas possible de continuer. Et puis après plusieurs jours posée dans un atoll magnifique, j’oublie vite ce petit désagrément. Nous rejoignons la passe sud de Fakarava, spot mondialement de connu de plongée. C’est cette destination qui m’a convaincu de passer outre ma crainte du mal de mer. “C’est une expérience à vivre une fois dans sa vie”, m’ont dit mes amis. C’est souvent cela, un moteur face à un frein. Finalement, il suffit que le moteur soit plus fort. Sortir de sa zone de confort c’est peut-être donc donner plus d’importances à ses envies qu’à ses peurs.

Cela peut revenir à se dire “si je fais ce choix-là, est-ce que je pourrais avoir des regrets ?”

Même si je suis malade sur la suite, je sais que je n’aurai aucun regret car c’est une expérience unique à vivre. Nager dans un aquarium naturel et géant. Nager entourée de requins, entourée de magnifiques poissons et coraux à profusion, observer des raies léopards et baigner dans des eaux turquoises, au fin fond du pacifique, c’est pour moi vivre un rêve éveillé.

Je contemple ces paysages pour les ancrer dans mes yeux, car aucune photo ne pourra aussi bien les voir que mes yeux. J’ai l’incroyable chance d’être là. Je ne suis pas quelqu’un de la mer, je ne pourrais clairement pas me payer un tel voyage dans les îles, si je n’avais pas la chance d’être sur ce bateau, et pourtant je suis là.

Alors qu’est-ce qui m’a donné une nouvelle fois cette chance ? ***Je dis une nouvelle fois, car je considère avoir eu de nombreuses fois dans ma vie de sacrées chances.***

A chaque fois, c’est lorsque j’ai osé sortir de ma zone de confort, saisir l’opportunité de vivre une expérience et voir ce qu’elle pourrait m’apporter. Je ne suis pas restée sur ma vision des choses a priori, j’ai accepté de vivre des choses différentes.

Tout a commencé lorsque j’ai accepté et soutenu mon compagnon dans la réalisation d’un de ses rêves, une traversée du Pacifique à la voile, un voyage de plus de 5 mois, qui allait l’amener du Panama à Tahiti. C’est déjà ce projet qui m’a donné l’opportunité, l’occasion de voyager à Tahiti, alors que depuis la Réunion je ne l’aurais pas envisagé. Après une si longue séparation et un si long voyage, j’ai voulu en profiter et j’ai organisé mon planning de travail pour me libérer 3 mois de break.

Finalement, quand on utilise ses forces dans sa vie, on fait des choses extraordinaires. Deux de mes forces sont l’amour et l’adaptabilité, c’est ce qui m’a permis d’être ici. Après 15 jours sur un voilier, même si je ne sais pas comment je vais vivre les prochaines traversées, même si je n’arrive pas à rejoindre Tahiti en voilier, j’aurais vécu au moins cela. La vie sur un bateau pendant quelques semaines, dans les eaux les plus belles du monde. Alors je sais que je suis prête à supporter de l’inconfort pour faire perdurer un peu plus cette expérience, car en toute expérience, j’apprends, j’apprends sur moi, j’apprends sur la vie, et j’apprends le bonheur toujours un peu plus.